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ARTICLE |
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Year : 2018 | Volume
: 16
| Issue : 2 | Page : 129-139 |
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Stigmatisation vécue par les familles de personnes ayant une déficience intellectuelle (DI) à Kinshasa, en République Démocratique du Congo.*
Heather M Aldersey1, Salomé Kavira2, Jeef Kiasimbua2, Willy Lokako2, Pélagie Miaka2, Lucie Monté2
1 Aldersey est professeure adjointe à l’école de réadaptation de l’Université Queen’s, George St., Kingston. Tous les auteurs, hormis Aldersey, sont également affiliés à l’Association Nationale des Parents des Enfants vivant avec Handicap Mental en RDC (ANAPEHMCO), Canada 2 Aldersey est professeure adjointe à l’école de réadaptation de l’Université Queen’s, George St., Kingston. Tous les auteurs, hormis Aldersey, sont également affiliés à l’Association Nationale des Parents des Enfants vivant avec Handicap Mental en RDC (ANAPEHMCO)
Date of Web Publication | 30-Jul-2018 |
Correspondence Address: Heather M Aldersey Queen’s University, School of Rehabilitation Therapy, 31 George St., Kingston K7L 3N6, ON Canada
 Source of Support: None, Conflict of Interest: None  | 1 |
DOI: 10.4103/INTV.INTV_44_18
Introduction: cet article expose les résultats d’un projet de recherche-action participative visant à : (a) comprendre la stigmatisation subie par les différents membres des familles vivant avec une personne ayant une déficience intellectuelle à Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC) et (b) identifier les stratégies utilisées par ces membres de la famille pour atténuer ou faire face à la stigmatisation, vécue dans leur société d’appartenance. Méthodes: nous avons mené vingt entretiens semi-structurés avec des membres des familles vivant avec une personne ayant une DI. Résultats: les participants à cette étude ont tous mentionné avoir vécu de la stigmatisation. Ils ont surtout ressenti cette stigmatisation lorsque les gens leurs lançaient des regards négatifs, utilisaient un langage ou des surnoms négatifs ou refusaient de toucher la personne ayant une DI. Les membres de la famille étaient eux-aussi visés par cette stigmatisation, car on les considérait comme « responsables » de cette déficience. Les membres des différentes familles ayant participé à l’étude ont mentionné avoir utilisé différents mécanismes ou stratégies de coping pour minimiser le stigma. Conclusion: les données de cette étude peuvent être mise à profit dans le développement d’interventions au profit des familles d’enfants ayant une DI. Les interventions suggérées comprennent la mise en place de lieu de contacts directs entre les personnes vivant la stigmatisation; la réduction ou l’arrêt de l’utilisation de surnoms négatifs et stigmatisants donnés aux personnes ayant une DI (par exemple : kizengi qui signifie idiot) ; et la promotion de groupes d’entraide et d’autodéfense des droits des personnes ayant une DI et de leurs familles.
Principales implications pour la pratique
- Les membres des familles de personnes ayant une DI à Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC) vivent différentes formes de stigmatisation sur les plans personnel et familial dans leur société d'appartenance
- Elles utilisent un certain nombre de stratégies d'adaptation pour y faire face, comme par exemple la référence à la religion, l'éducation des autres et la participation à des activités organisées par des associations d'entraide
- Les interventions suggérées comprennent la mise en place de lieu de contacts directs entre les personnes vivant la stigmatisation; la réduction ou l'arrêt de l'utilisation de surnoms négatifs et stigmatisants donnés aux personnes ayant une DI (par exemple : kizengi qui signifie idiot); et la promotion de groupes d'entraide et d'autodéfense des droits des personnes ayant une DI et de leurs familles.
Keywords: Stigmatisation, déficience intellectuelle, recherche-action participative, République démocratique du Congo
How to cite this article: Aldersey HM, Kavira S, Kiasimbua J, Lokako W, Miaka P, Monté L. Stigmatisation vécue par les familles de personnes ayant une déficience intellectuelle (DI) à Kinshasa, en République Démocratique du Congo.*. Intervention 2018;16:129-39 |
How to cite this URL: Aldersey HM, Kavira S, Kiasimbua J, Lokako W, Miaka P, Monté L. Stigmatisation vécue par les familles de personnes ayant une déficience intellectuelle (DI) à Kinshasa, en République Démocratique du Congo.*. Intervention [serial online] 2018 [cited 2023 Jun 9];16:129-39. Available from: http://www.interventionjournal.org//text.asp?2018/16/2/129/237953 |
*Manuscrit traduit de l'anglais
Introduction | |  |
Internationalement, les personnes ayant une DI et leurs familles vivent de la forte discrimination, de la marginalisation et souffrent fréquemment de stigmatisation dans leur société d’appartenance (Abbott & McConkey, 2006; Siperstein, Norris, Corbin, & Shriver, 2003). La stigmatisation est un ensemble de préjudices ou de stéréotypes, de comportements discriminatoires et de structures sociales biaisées promues par un groupe important au sujet d’un sous-groupe discrédité (Corrigan, 2000). Plusieurs chercheurs ont classé la stigmatisation selon quatre catégories distinctes attachées soit aux caractéristiques de la personne qui vit cette discrimination, soit à la façon dont cette discrimination est subie. La première catégorie, nommée stigmatisation publique décrit l’attitude des personnes envers la personne stigmatisée en général (Phelan, Bromet, & Link, 1998). La deuxième catégorie, rattachée au terme auto-stigmatisation décrit l’intériorisation d’un individu des opinions négatives de la société envers lui (Corrigan & Watson, 2002). La troisième catégorie, intitulée la stigmatisation par association ou stigmatisation de la famille décrit la stigmatisation qui affecte les personnes étroitement liées à la personne stigmatisée (Goffman, 1963 ; Larson & Corrigan, 2008). Enfin, la dernière catégorie, renvoyant au terme stigmatisation d’affiliation, décrit le fait que des proches intériorisent et ont des réactions psychologiques à la stigmatisation par association (Mak & Cheung, 2008). Cet article présente les résultats d’une recherche-action participative ayant pour but de : (a) comprendre la stigmatisation subie par les familles vivant avec une personne ayant une DI à Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC) et (b) identifier les stratégies d’adaptation utilisées par ces membres de la famille pour atténuer, éviter ou faire face à la stigmatisation.
La stigmatisation vécue par les différents membres de la famille des personnes ayant une DI peut avoir un certain nombre de conséquences négatives. Dans une revue systématique des écrits sur ce thème, Ali et ses collègues (2012) montrent que la stigmatisation « affecte le bien-être psychologique des parents et peut entraîner un stress parental élevé et une augmentation du fardeau des tâches quotidiennes et des soins, tout comme à une réduction de la qualité de vie » (p. 2138). Les familles des personnes ayant une DI peuvent être rejetées par d’autres membres de la famille, les amis ou d’autres personnes non familières à la famille, dans leur société d’appartenance (Pryor & Reeder, 2011). La stigmatisation peut conduire à une baisse de l’estime de soi et à une faible mobilisation (Dagnan & Waring, 2004 ; Hatzenbuehler, Phelan, & Link, 2013, Jahoda & Markova, 2004). Certaines personnes pensent que la stigmatisation est l’un des principaux facteurs conduisant à des inégalités sur le plan de la santé de la population et qu’elle peut être l’une des principales responsables de la morbidité et de la mortalité au niveau de la population (Hatzenbuehler et al., 2013). En dépit des efforts de recherche et des avancées théoriques considérables dans l’étude de la stigmatisation envers les personnes ayant une DI, la stigmatisation envers un membre de la famille d’une personne ayant une DI n’a reçu qu’une attention limitée (Ditchman Werner, Kosyluk, Jones, Elg, & Corrigan, 2013 ; Werner & Roth, 2014) et peu d’interventions ont été développées pour permettre de trouver des solution pour lutter contre la stigmatisation liée à la DI parmi le grand public (Walker & Scior, 2013).
Bien que de nombreuses recherches reconnaissent le caractère universel du phénomène de stigmatisation, plusieurs soulignent également l’influence et l’importance de la culture dans sa manifestation. Ainsi, elles expriment que la stigmatisation peut être influencée par des facteurs locaux et culturels (Murthy, 2002). Yang, Kleinman, Link, Phelan, Lee & Good (2007) affirment que « les significations, les pratiques et les conséquences de la stigmatisation diffèrent d’une culture à l’autre, alors que nous considérons que la stigmatisation est une réaction puissante et souvent utilisée à la maladie, au handicap et à la différence » (p. 1528). Semrau et ses collègues (2015) discutent des modèles explicatifs des handicaps selon les différentes cultures (par ex. l’attribution d’un handicap à une force surnaturelle), leurs significations culturelles et les conséquences engendrées par la présence d’un handicap chez un individu (par ex. l’impact de la stigmatisation sur la possibilité de se marier aura un impact différent d’une personne à l’autre, en fonction de l’importance du mariage dans la société). Ils discutent également les concepts de soi et de l’identité individuelle chez les personnes ayant un handicaps en tant que domaines clés à travers lesquels la culture peut façonner la manifestation de la stigmatisation. Outre les aspects culturels, les facteurs socio-économiques, tels que la pauvreté ou l’accès aux soins, peuvent eux-aussi influer sur la façon dont la stigmatisation se manifeste ou est perçue au sein d’une société spécifique (; Evans-Lacko, Knapp, McCrone, Thornicroft, & Mojtabai, 2013 ; Switaj, Wciorka, Smolarska-Switaj, & Grygiel, 2009 ; Thornicroft, Brohan, Rose, Sartorius, & Lee pour INDOGO Study Group, 2009).
Kinshasa, ville où cette étude a été menée, est la capitale de la République démocratique du Congo (RDC). La RDC est un pays africain qui connait un taux de pauvreté accrue, où l’aide sociale et sanitaire de l’État aux personnes ayant une DI et à leurs familles est limitée. La RDC figure en permanence au dernier rang de l’indice de développement humain, un indice composite qui évalue le niveau d’espérance de vie, d’éducation et le revenu par habitant (Programme des Nations unies pour le développement, 2014). Ces mauvaises notes indiquent que les familles qui vivent en RDC connaissent une espérance de vie et un niveau d’éducation extrêmement bas et un taux de pauvreté très élevé. Les familles congolaises dont un membre de la famille est touché par une DI doivent souvent faire face à des difficultés supplémentaires susceptibles de les faire basculer encore plus dans la pauvreté. Cela peut être dÛ à l’augmentation des frais médicaux et des coÛts relatifs à l’éducation, à la prise en charge à titre de proche-aidant “invalidant”, et à la baisse des possibilités de travailler en dehors du foyer familial (Aldersey, 2013b ; Aldersey, Turnbull, & Turnbull, 2016).
Bien qu’il n’y ait pas d’estimation officielle récente de la prévalence du handicap, les chercheurs utilisent des estimations globales pour affirmer qu’il y a environ 10,5 millions de personnes ayant un handicap en RDC (Lobe & Mubaya Kiwele Kya Bantu, 2013). Le taux de prévalence mondiale du nombre de personnes ayant une DI étant d’environ 1 % (Mckenzie, Milton, Smith, & Ouellette-Kuntz, 2016), il y aurait environ 800 000 de personnes ayant une DI en RDC. Chez les Congolais, la famille nucléaire ne représente souvent qu’une partie de la famille élargie, qui peut comprendre les grands-parents, les oncles et tantes, les cousins et cousines, les neveux et nièces et même des personnes n’ayant pas de lien de sang avec eux (Ranard, 2013). On suppose ainsi que la stigmatisation par association envers les personnes ayant une DI serait donc fréquente en RDC.
Des chercheurs ont affirmé que les personnes ayant une DI vivant dans les pays très pauvres, tels que la RDC, sont plus susceptibles d’être stigmatisés que ceux vivant dans les pays riches (Jones, Weil, Coreil, & Shoush, 2004). Les chercheurs ont également reconnu que les personnes ayant une DI pourraient figurer parmi celles les plus stigmatisées au niveau mondial (Scior et al., 2016). À ce jour, la littérature leur a toutefois accordé très peu d’attention, c’est pourquoi nous avons décidé d’étudier la stigmatisation envers les personnes ayant une DI en RDC de manière spécifique plutôt que la stigmatisation envers les personnes ayant un handicap en général. Bien qu’aucune étude spécifique n’ait été conduite sur la stigmatisation envers les personnes ayant une DI en RDC, des études sur différents sujets ont indiqué que la stigmatisation est un problème dont cette population souffre et qui devrait faire l’objet d’une étude plus pointue. Les chercheurs qui ont, par exemple, fait des études sur des personnes ayant une DI et leurs familles en RDC ont affirmé que la stigmatisation étaient pour eux, monnaie courante (Mukau Ebwel, Roeyers, & Magerotte, 2013). D’autres chercheurs ont mentionné qu’elle pourrait être un facteur clé qui empêche l’inclusion sociale des personnes ayant une DI et de leurs familles à Kinshasa, justifiant donc une étude plus approfondie (Aldersey, Turnbull, & Turnbull, 2014). Par conséquent, cette étude a tenté de répondre aux questions suivantes :- De quelle manière les membres de la famille des personnes ayant une DI subissent-ils la stigmatisation?
- Quels mécanismes de défense ou stratégies les familles des personnes ayant une DI utilisent-elles pour essayer de gérer, atténuer ou éviter la stigmatisation à Kinshasa?
Méthodes | |  |
Approche et préparation de la recherche
La recherche-action participative (RAP) est une approche qui implique une collaboration active des différents membres de l’équipe (participants et chercheurs), qui conduit à une partage des rôles de « chercheur » et « personne faisant l’objet de la recherche », ainsi qu’à un partenariat égal entre les chercheurs et les intervenants de la communauté (Grant, Nelson, & Mitchell, 2008). L’équipe de chercheurs qui a mené cette étude comprenait cinq parents d’enfants ayant une DI ainsi qu’une chercheuse spécialisée dans le soutien aux familles dont un membre est touché par une DI dans les pays à faibles et à moyens revenus. Nous avons collectivement travaillé sur des projets de recherche ensemble depuis 2011. Conformément aux valeurs clés de la RAP, les membres de l’équipe congolaise étaient activement impliqués dans toutes les activités de cette étude, y compris la conceptualisation de l’étude, le développement d’outils, la collecte et les analyses de données et la diffusion des résultats. Les cinq familles de chercheurs congolais ne participaient pas à la recherche, mais recueillaient les réponses des autres membres des familles participantes. Avant de commencer les entrevues, nous avons obtenu l’approbation éthique du comité universitaire d’éthique de la recherche en sciences de la santé de l’Université Queen’s.
Collecte de données
Les membres de l’équipe de chercheurs congolais ont mené vingt entrevues semi-structurés avec les familles (10 mères, 7 frères, 1 sœur, 2 grand-parents) d’enfants ou d’adultes ayant une DI. Nous avons défini le terme de « déficience intellectuelle» comme étant une personne dont les capacités intellectuelles et le comportement adaptatif (c’est-à-dire les compétences sociales et pratiques du quotidien) se situent en dessous des normes sociétales et que cette différence a été documentée avant l’âge de 18 ans (AAIDD, 2010). Bien qu’une discussion plus approfondie sur la définition de DI dans le contexte congolais aille au-delà de la portée de ce manuscrit, il existe d’autres discussions relatives à la définition de la DI au Congo ailleurs (Aldersey, 2013a). Compte tenu des difficultés à obtenir un diagnostic formel de DI à Kinshasa et le désir de laisser la « famille » ouverte, toute personne s’identifiant comme étant un membre de la famille d’une personne ayant une DI a été invitée à participer à cette étude.
Les enquêteurs ont tous suivi un guide d’entrevue semi-structuré, que les membres de l’équipe ont élaboré ensemble, contenant des questions relatives à l’expérience quotidienne au sein de la communauté, la discrimination, les réactions affectives à la stigmatisation et les stratégies visant à éviter ou atténuer la stigmatisation. Les entrevues ont été conduites en français ou en langue lingala (langue locale) et transcrites et, le cas échéant, traduites en français. Afin de protéger la confidentialité, les noms des participants ont été remplacés par des pseudonymes.
Analyse des données
Nous avons simultanément analysé des données qualitatives visant à identifier des thèmes au fur et à mesure qu’ils émergeaient (Charmaz, 2006). L’analyse simultanée des transcriptions de l’entrevue en équipe (l’équipe a soit rencontré la personne de visu ou a mené l’entrevue via Skype toutes les deux semaines environ, pendant les six mois de la collecte intensive de données) leur a permis d’examiner les thèmes émergents ensemble. Au cours de ces entrevues, les réflexions de l’équipe ont ensuite façonné les questions subséquentes concernant l’entrevue et l’enquête visant à confirmer ou à approfondir les thèmes et les concepts émergents (par ex. inciter les participants à commenter les stratégies de prévention de la stigmatisation identifiées au cours des précédentes entrevues). Une fois la collecte de données terminée, nous avons développé un guide de codage et codé les données en fonction de nos discussions de groupe initiales. Les membres de l’équipe ont tous codé les cinq transcriptions individuellement et se sont ensuite réunis pour discuter des codes et du processus de codage. Nous avons abordé des thèmes identifiés et sommes parvenus à un consensus sur les divergences. Le premier auteur a ensuite assigné les codes finaux en utilisant des thèmes déterminés de manière collaborative. Le deuxième auteur a ensuite codé cinq transcriptions qui avaient déjà été codées par le premier auteur pour avoir une confirmation ultérieure de l’accord.
Résultats | |  |
Les familles ayant participé à cette étude ont affirmé avoir vécue de la stigmatisation à deux niveaux : (a) la stigmatisation visant directement la personne ayant une DI qui a ensuite influencé le bien-être émotionnel des membres de la famille ; et (b) la stigmatisation envers les membres de la famille en tant qu’affiliés à la personne ayant une DI.
La stigmatisation visant directement la personne ayant une déficience intellectuelle, qui a ensuite influencé le bien-être émotionnel de ce membre de la famille
Les membres de la famille ont exprimé de la détresse et des sentiments négatifs après avoir été témoins de réactions négatives envers le membre de leur famille ayant une DI. Les participants ont remarqué que ces réactions venaient des membres de la famille élargie (par ex. une belle sœur ou des cousins), ainsi que des voisins ou encore de parfaits inconnus. Les expériences ayant eu une influence psychologique négative sur les membres de la famille les plus souvent citées étaient : (a) des regards humiliants et des surnoms donnés à la personne ayant une DI et (b) le refus de la toucher. Il est important de noter que bien que tous les participants aient été stigmatisés à un moment donné (et dans de nombreux cas, à plusieurs reprises), la plupart des participants ont affirmé aussi qu’en contrepartie d’autres personnes de la communauté n’adoptent pas de comportement de stigmatisation à leur égard et que celles-ci apprécient la personne ayant une affectée par au même titre que les autres. Il a donc été montré que les membres de la communauté n’adoptent pas systématiquement des comportements de stigmatisation à l’égard des personnes ayant une DI ou/et les membres de leur famille de la façon décrite ci-après.
Regards et surnoms humiliants
Beaucoup de familles ont jeté des regards dégradants visant directement les membres de la famille de la personne ayant une DI lorsqu’elle se trouvait au sein de la communauté. Parmi ces regards on compte : les grimaces de mépris, les regards en biais, des signes ou les sifflements (de dédain) entre les dents. Les participants ont affirmé que lorsque les gens regardent le membre de leur famille ayant une DI de cette façon, cela les mettait mal à l’aise, ou leur donnait un sentiment de honte, d’embarras ou de tristesse. Quelques participants ont indiqué que pour éviter cela, ils ne sont plus sortis au sein de la communauté avec le membre de leur famille ayant une DI.
« Cela me brise tellement le cœur de la voir comme ça que je ne peux plus me promener avec elle et ne la présente plus aux personnes qui viennent nous rendre visite à la maison. Je fais uniquement cela pour éviter que les gens la regardent avec mépris ! Le fait qu’elle soit comme ça est vraiment dur pour moi ! (Participante n° 7, mère).
Les participants ont en outre pu observer de la détresse de la part des membres de la famille qui disaient avoir subi une stigmatisation par le biais du langage ou de surnoms péjoratifs. La plupart des familles ont remarqué que le membre de leur famille ayant une DI était traité de sorcier, d’enfant de l’eau (‘mwana mayi1’), de fou, de personne qui ne sert à rien ou d’idiot (kisimbi ou kizengi en Lingala). Une famille a constaté que son enfant se faisait traiter de « gourmand » (c.-à-d. quelqu’un qui consomme tout le temps, l’argent et l’énergie de la famille). Les familles ont noté qu’on leur adressait des surnoms péjoratifs (la personne qui prononçait ces mots faisait en sorte qu’ils les entendent). Elles ont en outre raconté qu’elles entendaient aussi par hasard des gens parler de leur membre de la famille de manière désobligeante (la personne qui prononçait ces mots ne le faisait pas exprès pour qu’ils l’entendent).
Les familles ont ressenti plusieurs types de réactions affectives lorsque les gens parlaient de leurs enfants de manière désobligeante, allant de la tristesse et la frustration, à l’embarras et souvent aussi à la colère.
« Lorsque j’ai entendu ces paroles diffamatoires, j’étais très en colère parce qu’elle parlait de mon enfant. […] Elle parlait de mon enfant, celui qui mange beaucoup, qui est toujours malade et incapable de s’asseoir. […] J’en avais vraiment assez de tout cela. » (Participante 5, mère).
Refuser de toucher
En plus des regards et surnoms péjoratifs, les participants ont dit avoir rencontré des gens qui refusaient de toucher le membre de leur famille ayant une DI ou un objet avec lequel il ou elle était entré en contact (par exemple l’eau ou les ustensiles de cuisine/les couverts). Ils évitaient non seulement de toucher les objets avec lesquels cette personne était entré en contact, mais aussi les contacts auprès des autres membres de sa famille. Par exemple, un participant a raconté avoir eu à faire avec du personnel médical qui a refusé de toucher son enfant parce qu’ils ne voulaient pas entrer en contact avec la salive qui coulait sur son visage. Elle dit avoir eu à subir ce genre d’attitude même à l’église :
« Il est arrivé qu’elle [mon enfant] touche un autre enfant à l’église et que sa mère retire sa main de celle de ma fille avec haine et de manière odieuse. Cela m’a fortement affecté. À quoi pensait cette maman en faisant cela ? Elle pensait certainement qu’en touchant ma fille, elle aurait été contaminée par son handicap! Cela me brise vraiment le cœur. » (Participante 5, mère)
Outre le fait que les autres familles ne voulaient pas que leurs enfants entrent en contact physique avec ceux ayant une DI, les parents ont aussi raconté avoir eu des problèmes avec des femmes enceintes qui évitent le contact physique avec des personnes ayant une DI, de peur d’être « contaminées ».
« Les femmes enceintes ou celles qui continuent à procréer ont horreur de toucher une [personne ayant une déficience]. Elles racontent entre elles : « Si je touche un enfant comme ça, je donnerais certainement naissance à un enfant comme lui ! » ... les gens ont peur de toucher mon enfant. Même s’il tombe quand je ne suis pas à côté de lui, lorsque je le laisse seul, les mamans vont s’approcher, elles verront qu’il est tombé et passeront à côté de lui, parce qu’elles ont peur de le toucher en l’aidant à se relever ! (Participante 7, mère).
Bien que la majorité des participants ayant parlé de leur expérience liée à la « peur de toucher » ont indiqué que cette crainte s’adressait à la personne affectée par une DI, l’une des participantes a remarqué que la famille de son mari refusait de toucher tout ce avec quoi elle, en tant que mère, était entrée en contact :
« Si je prends une fourchette ou même une casserole pour faire à manger aux enfants, [ma belle-sœur] va jeter ces objets. ... Je ne peux pas les toucher parce que mes enfants sont handicapés, mes enfants sont des sorciers, et ils n’en veulent pas. » (Participante 16, mère).
En résumé, les participants ont affirmé que de nombreux membres de la communauté ont eu des comportements stigmatisants envers le membre de la famille ayant une DI, et ceci a eu des conséquences affectives négatives sur eux en tant que membre de la famille. Nous allons maintenant décrire la stigmatisation perçue lorsque les actions négatives sont orientées vers les membres de la famille affiliés (plutôt qu’envers les personnes ayant une DI).
Stigmatisation des familles
En plus de la honte, de l’embarras ou de la colère ressentis lorsque les actes de stigmatisation sont orientés vers les membres de la famille ayant une DI, les participants, et en particulier les parents, ont éprouvé des sentiments similaires lorsque la stigmatisation était à leur égard. Cette forme de stigmatisation était liée au rang de l’enfant ayant une DI au sein de la fratrie et au fait qu’on les rendait responsables de la déficience de l’enfant. La stigmatisation envers un membre de la famille affilié semble être influencée par le genre, car les femmes rapportent davantage subir souvent ce type de stigmatisation.
Une participante a déploré qu’en mettant au monde un enfant avec une DIune mère doit accepter qu’elle fera l’objet de moqueries ou que les gens la feront sentir inadéquate en tant que parent. Une autre participante a noté :
« Certaines personnes me reprochent d’avoir un enfant comme ça en pensant que je n’ai pas bénéficié de soins prénataux adéquats. Mais ils ont tort parce que j’ai régulièrement suivi des contrôles prénataux. [...] Ils ne disent cependant rien au sujet des femmes qui n’ont pas suivi de contrôles réguliers lorsqu’elles étaient enceintes, mais qui ont mis au monde un enfant sain. » (Participante 7, mère).
Il semble en outre que si l’enfant affecté par une DI est le premier né, ses parents subissent davantage de stigmatisation. Par exemple, lorsque le premier né présente une DI, la famille sera « étiquetée » comme étant incapable d’avoir une progéniture « normale ». Certains participants croient que pour enlever cette « étiquette » il faut avoir plusieurs enfants afin de prouver qu’on est aussi capable de mettre au monde des enfants qui ne sont pas handicapés et que leur lignée n’est pas contaminée.
Bien que de nombreuses mères d’enfants ayant une DI ont noté que leurs maris sont restés avec elles et que les deux parents ont été identifiés comme sources de soutien malgré la stigmatisation de la part de la famille élargie et de leur communauté, deux mères ont rapporté que leurs maris les avaient quittées à cause de ce handicap.
« [Mon mari croyait que mon enfant et moi] étions tous deux des sorciers qui détruisent les choses. Il a dit : ”je donne cet enfant en cadeau", puis il m’a abandonnée. » (Participante 2, mère).
Un des principaux thèmes soulevés par les participants en lien avec la stigmatisation vécue est et le blâme attribué aux familles et le lien fait par la culture entre le handicap, la sorcellerie et l’occulte. Les participants ont fait valoir qu’en RDC les familles sont souvent accusées de sacrifier l’intelligence de leurs enfants au profit de choses matérielles (par ex. une grande maison, une promotion professionnelle).
« Il y a eu un problème qui nous a vraiment choqués. Dans notre quartier, il y a des gens qui ont dit que nous avions construit une grande maison et que pour pouvoir le faire nous avons eu un enfant handicapé... qui est lié à la magie noire, à l’occulte. Ils ont dit que nous étions des occultistes et que la preuve en est cet enfant qui vit dans notre famille et qui n’est pas normal. » (Participant 19, père).
Les accusations de sorcellerie peuvent affecter tous les membres de la famille et pas seulement les parents. Par exemple, la sœur d’un enfant avec une DI a affirmé :
« Ils ont dit que nous étions des sorciers et que c’est pour cela que notre petit frère est devenu comme ça. Nos voisins nous ont chassés de chez eux [nous empêchant de leur rendre visite]. » (Participante 18, sœur).
En plus du fait de considérer la famille comme ayant sacrifié l’intelligence de l’enfant au profit de choses matérielles, on les a également accusés de sorcellerie lorsqu’on croyait que les parents étaient stériles et que la femme était tombée enceinte grâce à la sorcellerie ou à l’occulte (et que la DI de l’enfant en serait le résultat). Le fait d’avoir été accusés de sorcellerie a eu de nombreuses conséquences sur les membres de la famille, notamment le fait d’être exclus des réunions de voisinage ou de ne pas être les bienvenus chez les gens. De telles accusations provoquent également des sentiments de détresse et de frustration chez les membres de la famille.
En dépit du fait que la stigmatisation envers la personne ayant une DI et sa famille a provoqué de la détresse, les participants ont décrit toute une gamme de stratégies qu’ils utilisent pour atténuer, éviter ou gérer cette stigmatisation.
Gérer la stigmatisation
L’éventail des stratégies visant à atténuer la stigmatisation peut être organisé en termes de :- acceptation du membre de la famille atteint d’une DI et la possibilité de l’inclure dans les activités de sa communauté
- compréhension de la DI en termes de religion et de Dieu ;
- éducation des personnes qui stigmatisent ; et
- trouver le réconfort et soutien de la part des associations d’entraide.
Acceptation du membre de la famille ayant une déficience intellectuelle et possibilité de l’inclure dans les activités de sa communauté
De nombreux participants pensaient que la réduction de la stigmatisation doit commencer à la maison. Les participants ont affirmé qu’ils connaissaient d’autres familles qui avaient honte et qui étaient gênées d’avoir une personne présentant une DI dans leur famille. Ils ont dit qu’elles cachaient cette personne, ne s’occupaient pas de son hygiène corporelle, de sa santé, de sa propreté ou lui donnaient des surnoms stigmatisants.
« Certaines familles cachent leurs enfants. Elles ne veulent pas que les gens sachent qu’ils ont des enfants handicapés. Mais nous ne devons pas avoir honte de ces enfants. Nous devons nous mettre avant tout dans la tête qu’un enfant est une créature de Dieu et que nous devons l’aimer comme tout autre enfant. » (Participant 19, père).
Lorsque nous parlons de stratégies visant à atténuer la stigmatisation, les participants ont déclaré que si le membre de la famille ayant une DI est traité de manière stigmatisante ou péjorative par la famille, il est certain que la communauté en fera de même. En effet, un père a noté que : « la plus grande force pour minimiser la stigmatisation, c’est nous, les parents. La famille de l’enfant, c’est nous et la première forme de défense, c’est nous. » (Participant 4, père). Ainsi, les participants ont noté que pour réduire la stigmatisation envers la personne ayant une DI, la famille doit être la première à faire preuve de beaucoup d’amour, d’affection et à s’abstenir d’actes discriminatoires envers elle. En d’autres termes, les familles doivent façonner le type de traitement qu’elles attendent de la part des membres de la communauté envers le membre de la famille affecté par une DI.
En plus de faire preuve d’amour et de soutien à la maison, certains participants ont affirmé qu’ils essayaient d’intégrer le membre de la famille ayant une DI dans la communauté, dans l’espoir que l’interaction de la communauté élargie avec la personne réduirait la stigmatisation. Des participants, comme ce père, ont affirmé l’importance de « trouver des moyens de les faire sortir pour qu’ils soient en contact avec d’autres personnes », en faisant des promenades au sein de la communauté, par exemple, en allant à l’église ou au marché. Ce participant a en outre souligné l’importance
« d’insérer les [personnes ayant une DI] dans la société : de leur trouver un emploi ou de les aider à s’intégrer aux autres en dehors du foyer familial. » (Participant 15, père).
Référence à la religion et à Dieu
La plupart des participants ont exposé des stratégies clés en terme de religion, en particulier au niveau de la foi chrétienne. Les participants se sont appuyés sur la religion pour discuter de la façon dont ils gèrent la stigmatisation, donnent des conseils à d’autres familles stigmatisées et répondent aux membres de la communauté qui les stigmatisent. Une participante a tout d’abord expliqué qu’elle « accepte que les gens se moquent de moi et de mon enfant, mais Dieu est la seule chose qui compte ». Elle a également dit qu’elle essayait de ne pas donner trop d’importance à la stigmatisation qu’elle subissait, mais qu’elle avait plutôt commencé à « tout mettre entre les mains de Dieu, parce que l’enfant connait lui aussi Dieu et notre Seigneur prendra soin de nous » (Participante 1, mère). Une autre personne a expliqué qu’elle n’avait aucun problème à donner de la valeur à son enfant et qu’elle ne faisait pas attention à la négativité des autres parce que « c’est Dieu qui m’a donné cet enfant » (Participante 10, mère). Enfin, quelqu’un d’autre a souligné ne pas du tout tenir compte de ceux qui disent aux femmes enceintes de ne pas toucher les personnes ayant une DI, parce que ces croyances ne sont pas conformes à sa religion chrétienne. Lorsqu’elles ont interagi avec d’autres familles dont un membre a une DI, en plus de ces stratégies d’adaptation personnelles, les participants ont parlé de la religion et de la référence à Dieu. Un père de famille par exemple nous a raconté qu’il a dit à d’autres familles : « vous devez vous mettre en tête que l’enfant est une créature de Dieu et vous devez donc le traiter comme n’importe quel autre enfant. » (Participant 19, père). Un autre participant a expliqué qu’il conseille aux familles d’arrêter de négliger ou de maltraiter le membre de la famille porteur d’une DI parce que « vous négligez peut-être l’objectif que Dieu vous a fixé... cet enfant pourrait être une source de bénédiction » (Participante 6, grand-mère).
Et enfin, quelques participants ont évoqué le fait que Dieu et la religion répondraient directement à ceux qui les stigmatisent ou qui stigmatisent le membre de la famille affecté par une DI. « Je leur dit que c’est un être humain comme les autres que Dieu a créé, qui peut être utile à la société » (Participant 15, père). Un autre participant mentionne que lorsque les gens réagissent comme si l’enfant handicapé était contagieux : « Je leur répond qu’ils doivent arrêter d’avoir ce genre de préjugés et que mon enfant n’est pas contagieux. Son handicap est la volonté de Dieu » (Participante 5, mère).
Éducation
Une autre méthode clé pour atténuer ou réduire la stigmatisation que les familles utilisent est d’éduquer ou de raisonner les gens qui stigmatisent. Les participants partagent des informations sur la personne handicapée et/ou son handicap. Par exemple, certains participants expliquent l’histoire du membre de la famille handicapé ainsi que son handicap à leurs voisins (par exemple que ce handicap est survenu après une maladie) afin de réduire les accusations de sorcellerie ou d’occultisme. Une participante a admis avoir sur elle des photos de son enfant avant sa DI pour pouvoir prouver à son entourage qu’il était jadis « normal ». D’autres participants prennent le temps d’expliquer à ceux qui les accusent d’être responsables de la DI de leurs enfants que ni la personne avec une déficience, ni eux-mêmes ne sont des sorciers. Ils leur expliquent par exemple que leur enfant est propre et bien habillé et qu’il ne peut donc pas être un sorcier ou que leur famille est pauvre et donc « qu’aurions-nous eu à y gagner si nous étions occultes ? » (Participant 19, père). D’autres encore essayent simplement d’expliquer qu’une DI n’est pas contagieuse et que les autres ne risquent pas « d’attraper » cette déficience.
Les associations d’entraide
La dernière stratégie que de nombreux participants ont utilisée consistait à trouver du réconfort et à partager leurs expériences avec d’autres personnes se trouvant dans une situation similaire, par exemple d’autres parents au sein d’une association d’entraide. Les participants ont dit qu’ils s’attendaient à ce que les associations d’entraide leurs permettent « d’oublier » la stigmatisation (participante 6, grand-mère), de « trouver la paix » (participante 1, mère) ou de « s’habituer aux défis posés par la déficience » (participant 15, père). D’autres ont évoqué les avantages de la solidarité face à la stigmatisation.
« Faire partie d’une association a été très bénéfique. Tout d’abord au niveau moral. Je peux maintenant affirmer que je ne suis pas seul. Parce que, comme on dit toujours : l’union fait la force. Dès que vous comprenez que vous n’êtes pas seul avec votre problème, vous avez l’impression que le problème s’est dissipé et vous vous sentez soulagé. » (Participant 19, père).
L’expression ci-dessus, « l’union fait la force », a été utilisée par trois participants pour parler du fait que de fréquenter d’autres familles les aident à atténuer ou à faire face à la stigmatisation. En plus du soutien moral qui les aide à atténuer ou à faire face à la stigmatisation au niveau personnel, les participants ont également constaté que le fait de rencontrer d’autres personnes dans le même cas qu’eux les aidait à prendre des mesures contre la stigmatisation dans la société.
Discussion | |  |
Cette étude a examiné la stigmatisation vécue par 17 parents, 1 membre de la fratrie et 2 grands-parents de personnes ayant une DI vivant à Kinshasa, en RDC. Les participants à cette étude ont tous parlé du fait qu’ils ont subi des préjugés à un moment donné de leur vie. La stigmatisation que les participants ont décrite dans cette étude a pu être qualifiée de : stigmatisation publique (la stigmatisation visant le membre de la famille affecté par un handicap mental) ; stigmatisation par association (stigmatisation visant le parent ou le membre de la famille en raison de son lien de parenté avec la personne souffrant d’une DI) ; et stigmatisation d’affiliation (réponse psychologique à la stigmatisation par association). Les sentiments exprimés par les familles dans cette étude sont similaires à ceux exprimés dans d’autres cultures dans le monde, en particulier : la honte, l’embarras et la détresse découlant du fait d’être un parent ou un membre de la famille d’une personne handicapée (Baxter & Cummins, 1992 ; Chang, 2009; Green, 2004; 2007 ; Ntswane & van Rhyn, 2007; Perkins, Holburn, Deaux, Flory, & Vietze, 2002 ; Shin, Nhan, Crittenden, Hong, Flory, & Ladinsky, 2006 ;). Il se peut que la stigmatisation soit plus fortement ressentie par les membres de la famille de sexe féminin (et en particulier les mères) parce que la DI est souvent attribuée à des problèmes pré- ou périnataux pendant la grossesse de la mère. Par conséquent, on reprochait aux femmes d’être en quelque sorte responsables de la DI. La stigmatisation pourrait également être davantage ressentie par les femmes en raison du déséquilibre persistant des genres en RDC, où les femmes continuent d’être considérées comme vulnérables et inférieures (Mbambi & Faray-Kele, 2010) et où elles sont par conséquent davantage victimes de stigmatisation ou de mépris du public par rapport aux hommes.
Les membres de la famille ont identifié une série de stratégies d’adaptation qu’ils ont utilisées pour minimiser la stigmatisation. Parmi celles-ci, on compte : l’acceptation du membre de la famille atteint d’une DI et l’accès aux activités de sa communauté la compréhension et la discussion autour du handicap en termes de religion et de Dieu ; l’éducation des personnes qui stigmatisent ; et le réconfort et le soutien de la part des associations d’entraide. Dans cette étude, de nombreux mécanismes exprimés par les familles sont également conformes aux mécanismes d’adaptation utilisés par les familles qui ont été identifiés dans une étude systématique globale récente, comme : l’éducation des autres, la référence à la religion ou à Dieu et le soutien des amis (d’une façon similaire aux associations d’entraide ; Ali, Hassiotis, Strydom, & King, 2012).
D’autres personnes, dans de nombreux contextes (par ex. Baxter, 1989), ont aussi observé les réactions spécifiques de la communauté qui ont été revélées dans cette étude envers la personne ayant une DI, tels que : dévisager, donner des surnoms péjoratifs et la peur d’être contaminé. Les participants à cette étude ont souvent soulevé le problème des surnoms péjoratifs que l’on donne. Au cours des dernières années, on a porté un intérêt croissant sur le pouvoir du langage, car celui-ci est étroitement liée au handicap et en particulier, aux conséquences qu’a le fait de qualifier quelqu’un d’une catégorie, de le répertorier comme étant la catégorie ou la stigmatisation. La terminologie anglaise et française relative à la DI a changé au cours de l’histoire, partant de « retard mental » à toute une série de termes plus offensifs utilisés pour décrire ces personnes au cours de 200 dernières années (Schalock, Luckasson, & Shogren, 2007). Le terme « déficience intellectuelle » en français est désormais moins offensifs, moins négatifs et moins stigmatisants que ceux que l’on utilisait dans le passé (Schalock et al., 2007 ; Gouvernement de l’Ontario, 2004). Il n’existe à ce jour aucun terme couramment utilisé qui ne stigmatise pas les personnes ayant une DI en langue Lingala, la langue la plus couramment parlée à Kinshasa. Les résultats de cette étude ont confirmé le fait que la stigmatisation publique est souvent déclenchée par une étiquette (Bos, Pryor, Reeder, & Stutterheim, 2013). Actuellement, si les familles veulent identifier ou classer leur enfant ayant une DI avec des termes non stigmatisants, elles utilisent souvent le terme (français) : « déficience intellectuelle ». Nous insinuons donc que pour réduire ou éliminer les surnoms négatifs et stigmatisants (Par ex. kizengi), il faut faire des efforts ciblés, ainsi que des campagnes de sensibilisation publiques en RDC et développer une terminologie appropriée en langue Lingala et dans les autres langues nationales utilisées au Congo.
Cette étude ne fait que confirmer et illustrer la façon dont, selon certains chercheurs, (Chiu, Yang, Wong, Li, & Li., 2013 ; Yang et al., 2007 ; Yang, Phillips, Lo, Chou, Zhang, & Hopper, 2010) la stigmatisation liée à la culture peut être « associée aux attributions, émotions et comportements liés à la stigmatisation » (Mak & Cheung, 2008, p. 542). En particulier, il est compris que, selon les croyances liées à la différence et à la malchance du peuple congolais et Africain, la « déviance de la norme » est intrinsèquement liée à la sorcellerie et à l’occulte, alors que cette croyance est probablement inhabituelle en Amérique du Nord et en Europe (par ex. Corin, 1979 ; Devlieger, 1995 ; Livingston, 2005 ; White, 2004). Whyte (1998). Par exemple, il a été constaté qu’en Ouganda de l’est, la DI est souvent expliquée comme étant une cause de malheur, là où l’esprit se réfère aux ancêtres et à l’utilisation de la sorcellerie. En RDC, les ressources du monde extérieur moins tangibles, tels que Dieu, les ancêtres, les esprits ou les sorciers, sont tout aussi importantes que d’autres facteurs plus tangibles, tels que la nature et la biomédecine, en rapport avec l’apparition, le maintien et l’atténuation de la différence ou la (mal)chance (Devlieger, 1995). Il est tout à fait évident que même le surnom péjoratif mwana mayi, « enfant de l’eau », qui a souvent été identifié par les familles ayant participé à cette étude est, dans un contexte centrafricain, lié à la sorcellerie et en particulier à la capacité d’accumuler le pouvoir pour accéder à la richesse (Janzen, 1992 ; Biaya, 2004). Dans le contexte spécifique de Kinshasa, les chercheurs ont affirmé que la sorcellerie est un modèle explicatif pour décrire les choses que l’on n’arrive pas à comprendre ou qui portent atteinte aux normes établies (Aldersey, et al., 2014; Corin, 1979; White, 2004). Cette étude confirme ultérieurement ces écrits et démontre qu’aux yeux du public, les personnes ayant une DI et leurs familles résidant à Kinshasa continuent d’être associées à la sorcellerie et à l’occulte lorsqu’ils sont considérés comme étant différents des normes établies sur l’aspect physique, le comportement et les contributions sociales.
Dans une étude globale sur la stigmatisation et la DI, Scior et ses collègues (2011) ont constaté qu’en Asie, en Afrique et dans d’autres parties du monde, la stigmatisation peut découler de « préjugés et (de) croyances stigmatisantes bien ancrées sur les raisons de la DI» (p. e294). Comprendre les histoires de sorcellerie peut aider à comprendre l’importance de la prévention de la stigmatisation et de copier les stratégies d’éducation de la communauté quant à la cause de la déficience. Cela « normalise » en quelque sorte la déficience comme étant la conséquence d’une maladie et répond au facteur culturel du degré auquel les membres de la famille sont tenus responsables de la situation (Crandall & Martinez, 1996). Si les membres de la famille sont en mesure d’éduquer pour montrer qu’ils ne sont pas directement responsables de la déficience en raison de l’utilisation de sciences occultes, il se pourrait qu’ils soient moins stigmatisés au sein de la communauté. La stratégie particulière visant à instruire les autres sur la déficience dans le but de prévenir ou de réduire la stigmatisation liée à la déficience est également utile en dehors des discussions tournant autour de la sorcellerie (Ali et al., 2012 ; Baxter & Cummins, 1992 ; Todd & Shearn, 1997). Par exemple, Farrugia (2009) a constaté que les parents d’enfants ayant un trouble du spectre de l’autisme résistaient au sentiment de stigmatisation en donnant des informations d’ordre médical.
Les données relatives à cette étude indiquent que les interventions orientées vers la famille devront tenir compte de l’importance d’honorer les personnes ayant une DI en tant que membres de la famille estimés et respectés pour éviter de contribuer à la stigmatisation publique de ceux-ci. Pour réduire la stigmatisation publique, les interventions de la famille devraient en outre préconiser l’importance des sorties au sein de la communauté, ainsi qu’un contact ciblé, local, crédible et continu avec des personnes stigmatisées (Corrigan & Kosyluk, 2013). Il serait tout aussi bénéfique pour une intervention orientée vers la famille de discuter des stratégies ou des techniques utilisées pour adresser des actions, affronter les mots et les regards négatifs envers la personne ayant une DI et sa famille. Les réponses des participants ont en outre indiqué que le genre peut jouer un rôle important dans la stigmatisation vécue à Kinshasa. Dans d’autres contextes, les chercheurs ont également indiqué que la stigmatisation peut être différente en fonction du genre (Chang, 2009 ; Edwardraj, Mumtaj, Kuruvilla, & Jacob, 2010 ; Fazil, Bywaters, Ali, Wallace, & Singh, 2002 ; Mak & Cheung, 2008). Ainsi, il est conseillé d’intégrer des discussions et des stratégies qui tiennent compte du sexe dans la structure des interventions familiales ciblées. En plus, l’intervention familiale à Kinshasa pourrait également inclure des discussions tournant autour du fait que la foi en Dieu peut être l’une des stratégies de résistance majeure que les familles de personnes ayant une DI peuvent utiliser (Crabtree, 2007a,b; Edwardraj et al., 2010), ou qu’elle pourrait être utilisée comme stratégie pour entamer des discussions sur l’humanité partagée et l’expérience humaine commune qui peut réduire la stigmatisation liée à la croyance d’une différence ou d’une déviance d’une norme culturelle.
Enfin, il est important de souligner le rôle clé que les associations d’entraide aux familles peuvent jouer dans la réduction ou l’atténuation de la stigmatisation subie par les familles de personnes ayant une DI. Les données de l’analyse des associations familiales en RDC concordent avec une étude globale récente sur la stigmatisation et la DI, où Scior et ses collègues (2016) ont identifié le rôle clé des parents dans la réduction de la stigmatisation de la personne ayant une DI. La recherche a démontré que nombreux sont les membres de la famille qui préfèrent fréquenter des endroits qui acceptent mieux les personnes avec une DI, tels que les groupes de soutien et d’entraide (Power, 2008 ; Shearn & Todd, 1996 ; Todd & Shearn, 1997). Dans une revue systématique de la stigmatisation des personnes avec une DI et de leurs familles, Ali et al., (2012) ont observé que de recevoir le soutien d’amis était lié à la stigmatisation de manière négative et ils en ont conclu que « d’avoir des amis qui nous soutiennent » peut-être l’une des approches visant à réduire l’impact de la stigmatisation d’affiliation » (p. 2135). Des groupes d’entraide et de plaidoyer peuvent fonctionner comme un mécanisme de soutien en réduisant la stigmatisation par le biais du partage des expériences et l’assistance mutuelle (Chang, 2009 ; Shu & Lung, 2005). En allant plus loin et en s’engageant dans des actions d’activisme et dans d’autres actions visant à atténuer la stigmatisation, comme celles dont ont parlé les participants cette étude, on peut aussi aider les membres de la famille à avoir moins honte et même à être fiers de leur parenté, ou d’arriver à ce que les autres membres de la famille respectent les mères et leurs enfants et leurs accordent un statut plus important (Chang, 2009).
Limites
Cette étude n’est pas sans limites. Tout d’abord, la méthode de recrutement que nous avons utilisée (par ex. sur le réseau d’une association d’entraide aux parents) peut avoir limité la représentativité des participants que nous avons recrutés et la nature des réponses que nous avons reçues. Nous croyons toutefois que les informations recueillies auprès des personnes au sein du réseau de cette association est également susceptible de faire écho chez les personnes externes à ce réseau et de leur être bénéfique. De plus, bien que nous ayons accepté toutes les personnes qui s’identifiaient comme étant un membre de la famille d’une personne ayant une DI, en raison de la durée et des ressources limitées nous empêchant de faire appel à des méthodes de recrutement de plus grande envergure, notre échantillon final représentait davantage les parents que tout autre membre de la famille. C’est une limitation dans le sens où la représentation de l’expérience des « familles » a tendance à refléter tout d’abord le vécu des parents et en particulier, des mères. De ce fait, nos résultats doivent être considérés comme étant des expériences vécues par un groupe de membres de la famille sélectionné, dont la majorité sont des parents.
Conclusion | |  |
Nous ne pensons pas qu’il existe une région quelconque où les personnes ayant une DI et leurs familles ne soient pas stigmatisés. Bien que la stigmatisation puisse varier d’une personne à l’autre et d’une culture à l’autre, cette étude a fourni davantage d’indications sur le fait que la stigmatisation est courante à Kinshasa. Malgré les expériences courantes, nous croyons qu’en se basant sur nos résultats, on peut affirmer qu’en RDC, la stigmatisation liée à la DI est un phénomène particulièrement répandu et grave, et qu’elle a des répercussions majeures sur les les personnes ayant une DI et leurs familles. Les interventions qui placent les personnes ayant une DI et leurs familles au premier rang de la lutte contre la stigmatisation sont fondamentales et cette RAP représente une tentative d’y parvenir. Dans les années à venir, nous envisageons de prendre des mesures orientées vers la famille basées sur des données probantes en nous appuyant sur cette recherche afin d’améliorer la vie des personnes ayant une DI et de leurs familles en RDC.
Remerciements
Les auteurs souhaiteraient exprimer leur plus profonde gratitude envers les familles ayant participé, qui nous ont accueillies chez elles et partagé leurs expériences de la stigmatisation et du handicap avec nous. Nous souhaitons remercier tout particulièrement Mme. Delphine Assumani pour son assistance dans les recherches logistiques à Kinshasa. Cet ouvrage a été financé par une récompense interne du comité consultatif sénatorial de recherche de l’Université Queen’s (SARC) obtenue en 2015. Nous souhaitons remercier Prof. Melina Rivard, Prof. Celine Chatenoud, et Madame Justine Grenier-Martin pour leur assistance dans la traduction de texte d’article en français.[69]
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1La référence à un « enfant de l'eau » dans un contexte centrafricain est lié
à la sorcellerie, en particulier la capacité à accumuler le pouvoir pour
accéder à la richesse (Janzen, 1992 ; Biaya, 2004).
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